Drame du site d’orpaillage de Gongombiro : tristesse et désolation, 72 heures après l’incident

Publié le jeudi 24 février 2022 à 19h56min

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Drame du site d’orpaillage de Gongombiro : tristesse et désolation, 72 heures après l’incident

Trois jours après le malheureux incident qui s’est produit au site d’exploitation artisanale d’or de Gongombiro, dans la commune de Gbomblora (à 25 km de Gaoua), les langues ont encore du mal à se délier sur les circonstances et les dégâts humains que ce drame a engendrés. Du constat dans la soirée du 23 février sur le site, quelques survivants sont occupés à plier bagage vers d’autres horizons avant l’expiration du délai de 72 heures données par les autorités régionales pour quitter les lieux.

Un silence inhabituel règne à l’entrée du site d’or de Gongombiro. Situé en bordure de route (axe Gaoua Batié), ce site est devenu un arrêt obligatoire pour les passants qui veulent s’imprégner de l’ampleur des dégâts matériels de l’explosion qui a coûté la vie à une soixantaine de personnes.

Des arbres asséchés et déracinés, des maisons en tôle déchiquetés, des restes de matériels brûlés,… c’est le visage que présente l’entrée du site de Gongombiro. Passants et occupants des lieux continuent à s’interroger sur la cause exacte de cette explosion au regard de la physionomie du lieu d’où serait parti la détonation.

Retour sur les faits selon quelques orpailleurs trouvés sur le site

Orpailleur Aziz Ouédraogo

Aziz Ouédraogo, se trouvait sur le site  : « Je dormais dans ma maison à 150 mètres du site, un bruit d’explosion m’a réveillé et toute ma maison était pleine de poussière. Je suis sorti pour voir ce qui se passe, en allant vers le site j’ai rencontré des gens qui couraient de partout. Un d’eux m’a demandé de l’amener au dispensaire de Gbomblora. Dès que je suis revenu, je suis reparti avec un de mes éléments qui était gravement blessé avec ses intestins au dehors ».

Sur la cause de l’explosion, il est formel. « Certains disent que c’est ‘’farawé (far away, un explosif utilisés par les orpailleurs pour le dynamitage des roches), ndlr), d’autres disent que c’est une bombe. Rien de tout ça ; moi je pense que c’est une bonbonne de gaz qui a explosé chez ceux qui font la fonte… ».

Puis d’ajouter : « l’intéressé (le propriétaire du hangar d’où est parti le feu) même a dit à ses éléments de sortir parce que y’a un danger ; et il a pris sa voiture fuir. Ceux qui sont partis pour aider à éteindre le feu sont restés dedans parce qu’ils ne savaient pas ce qui les attendaient ».

Aziz Ouédraogo dit être dans le domaine depuis 16 ans. « Un farawé ne peut pas exploser comme ça, c’est du gaz qui a explosé » insiste-t-il.

Pour un autre orpailleur du nom de Tindano, beaucoup de choses se disent sur la cause de ce drame. « Certains disent que ça été causé par les farawé, d’autres disent que ce n’est pas ça, moi particulièrement je n’en sais rien, j’ai entendu le bruit et les cris depuis mon hangar, je suis sorti et c’était la catastrophe. Dieu merci je suis en vie, on s’en remet à Dieu ».

Des horizons inconnus pour bon nombre de survivants

Laveur d’or sur le site, Seydou Nacanabo

Face à pareille situation, le traumatisme se lit sur les visages des survivants qui s’affairaient à partir avec ce qui peut être emporté sur le champ. La solidarité demeure le maître-mot en pareilles circonstances.
Un des sinistrés et laveur d’or sur le site, Seydou Nacanabo, visiblement abattu, raconte : « J’ai perdu trois de mes petits et un autre est à l’hôpital. Depuis lundi je n’ai pas mangé et je ne me suis pas lavé, la mort des trois enfants là…On doit partir, mais où ? », soupire-t-il.

Un autre orpailleur, devant une boutique en plein déménagement, se confie : « cette boutique appartient à un de nos frères qui est actuellement blessé, et comme on nous dit de fermer dans trois jours, nous sommes en train de la vider pour mettre en lieux sûrs ses marchandises qui sont périssables. Depuis que je suis né je n’ai jamais vu autant de morts ».

Loin de sa famille, Aziz Ouédraogo dit ne pas savoir où mettre la tête. « On nous a donné trois jours pour partir, mais sincèrement on ne sait pas où on va aller. Je suis venu de Ouahigouya, je n’ai pas de parents ici, je vais rester à Gaoua d’abord … », annonce-t-il.

Dans le village qui abrite le site d’exploitation artisanale d’or, Gongombiro, les jeunes qui fréquentaient les orpailleurs sont également sans voix. L’un d’eux qui a requis l’anonymat témoigne : « on avait beaucoup d’amis parmi ces orpailleurs, certains sont morts dans l’explosion, d’autres gravement blessés. Rien qu’à regarder le site, c’est l’amertume totale et ce n’est pas simple à supporter et surtout pour longtemps ».

En rappel une forte explosion s’est produite le lundi 21 février 2022 aux environs de 14h sur le site de Gongombiro, et a coûté la vie à 60 personnes et fait une cinquantaine de blessés qui ont été admis au centre hospitalier régional de Gaoua. Le gouverneur de la région du Sud-ouest a ordonné la fermeture du site jusqu’à nouvel ordre.

Boubacar TARNAGDA
Lefaso.net

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