Violences sexuelles et physiques sur mineurs : Des victimes racontent leur mésaventure dans la commune de Dissin

Publié le vendredi 4 septembre 2020 à 16h48min

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Violences sexuelles et physiques sur mineurs : Des victimes racontent leur mésaventure dans la commune de Dissin

Le réseau des journalistes et communicateurs pour la protection de l’enfance du Sud-Ouest a organisé du 22 au 24 juillet 2020 une caravane de presse qui a sillonné les communes de Dissin, Batié et Gaoua. Dans la commune de Disshin (province du Ioba, région du Sud-Ouest) des filles victimes de violences sexuelles et de pires formes de travail ont trouvés réconfort avec l’aide des services de l’action sociale. Cette caravane de presse a été possible grâce à l’appui de Giz Pro Enfant à travers son programme ‘’Health Focus’’.

La commune de Disshin comme plusieurs autres localités du Burkina Faso enregistre malheureusement des cas de violences de diverses formes sur des mineurs. Les services de l’action sociale de cette localité ont enregistré jusqu’à ce jour 3 cas de violences sexuelles, 2 cas de viols et 23 cas de pires formes de maltraitance.
Des victimes ont accepté revenir ce qu’elles ont vécu même si le choc psychologique se lit toujours sur leur visage. Vivi (nom d’emprunt) âgée de 15 ans et élève en classe de 6e a été violée par un groupe de quatre garçons le 24 décembre dernier sur le chemin de retour de la messe.

Vivi -victime de violence sexuelle « je veux reprendre l’école, mais quand je pense à ce que les quatre garçons ont fait, mes larmes coulent… »

« Les quatre garçons m’ont arrêtée à côté d’un buisson, ils m’ont violée à tour de rôle. Arrivée à la maison j’en ai parlé à mon père qui m’a envoyé au dispensaire pour des soins. Le lendemain il est allé expliquer à la police qui a arrêté ces quatre garçons. Ils ont été ensuite envoyés à Bobo-Dioulasso et l’affaire est entre les mains de la justice » nous confie Vivi. Le traumatisme de cet acte contre sa personne est difficile à vivre après plusieurs mois. « Depuis je ne pense qu’à ça, je n’arrive plus à étudier et j’ai arrêté l’école en même temps », ajoute-elle. Son souhait le plus ardent est que ses quatre violeurs soient condamnés à la hauteur de leur forfait.

Flora -Victime de violence sexuelle « certains adultes doivent arrêter ce genre de pratiques sur des mineurs, c’est honteux »

La deuxième victime Flora âgée aujourd’hui de 22 ans a également été victime de viol en aout 2016 par un homme qui lui aurait demandé un service avant d’abuser d’elle. « J’étais à la pompe pour puiser de l’eau pour ma mère, c’est ainsi qu’il est venu me demander de l’aider avec ses bidons d’eau. Je lui ai dit que lorsque j’aurai fini de prendre l’eau pour ma mère je vais remplir ses bidons. J’ai accepté de l’aider parce que je le connais et il ne loge pas loin de chez moi. Quand j’ai rempli ses bidons je les ai mis sur mon vélo. Arrivée je l’ai trouvé couché sur sa terrasse, il a ouvert la porte et j’ai déposé les trois bidons. Après cela il m’a demandé si je pouvais toujours l’aider à laver ses plats sales. J’ai accepté de le faire. Quand j’ai fini, j’ai demandé ou je pouvais ranger les plats lavés. Il m’a dit dans sa chambre, j’ai hésité il m’a dit que je peux entrer sans problème. Effectivement quand je suis rentrée j’ai remarqué que ses ustensiles de cuisine sont dans sa chambre. Après avoir déposé les plats je voulais ressortir et il m’en à empêcher. Je me suis débattue en vain, et il a fait ce qu’il voulait faire et je suis sorti tout en larme… » raconte Flora. Après l’incident la victime était dans l’incapacité d’en parler à sa mère. Elle réussit à se confier quelques jours après à une voisine, ensuite à l’action sociale et à la justice.

La victime dit avoir subi un choc psychologique pendant longtemps. Car « j’avais du mal à sortir parce que les gens racontaient que j’accusais le monsieur pour rien. Ce dernier a raconté aux gens qu’il a refusé de me donner de l’argent que j’avais demander avec lui. Mais bien avant cela il n’y avait aucune familiarité entre lui et moi, je l’ai connu avec une grande sœur (une voisine). Moi je sais ce que j’ai subi, et quand tu vois les gens te regarder d’un certain air, ce n’est pas facile à vivre. Je voyais que ma vie n’avait plus de sens… ».

Le réconfort de cette victime a commencé à venir petit à petit après la condamnation de son bourreau par les instances judiciaires. Mieux elle s’est forgée un mental pour surmonter cette épreuve. « Avec courage je me suis dit que je ne dois pas demeurer dans cet état. C’est ainsi que j’ai décidé de sortir, de m’amuser avec mes amies pour oublier ce qui m’est arrivé » nous confie Flora.

Pour transformer cet incident en opportunité Flora a été choisie comme paire éducatrice afin de sensibiliser ses camarades sur ces types de violences faites aux filles. « Sincèrement dit j’ai apprécié cette formation qui m’a aidé à oublier beaucoup de choses » se réjouis-t-elle.

Flora -Victime de violence sexuelle « certains adultes doivent arrêter ce genre de pratiques sur des mineurs, c’est honteux »

Ajoutés à ces violences sexuelles, des cas de violences physiques ont été également enregistrés dans la commune de Disshin. En témoigne le cas de Akissi âgée de 18 ans qui était aide-ménagère à Ouagadougou en 2019 chez une dame qui lui fit vivre des moments de souffrance dans sa quête d’emploi. « Je travaillais pour une dame qui m’insultait et me battait à tous moments. Elle utilisait les fils de chargeur de téléphone pour me fouetter, je ne mangeais pas à ma faim, il m’arrivait même de dormir très souvent avec la faim. Elle ne me donnait pas mon salaire qui était de 8 500 FCFA ».

Pour sortir de ce calvaire elle s’est confiée à une autre dame de nationalité étrangère qui l’a conduite auprès des services de l’action sociale. « Quand ma patronne fut convoquée à l’action sociale, elle a été contrainte de me payer mon argent qu’elle gardait par devers elle. Ce sont les agents de l’action sociale qui m’ont ramenée chez moi et m’ont trouvé un atelier de couture ou j’apprends ce métier ».

President du réseau communal de protection et de promotion de l’enfant de Dissin, Médard Somé

Pour venir à bout de ces pratiques dégradantes une synergie d’actions s’avère impérieuse, et c’est dans cette dynamique que le réseau communal de protection et de promotion de l’enfant de Disshin est né depuis novembre 2016. Pour le président de ce réseau Médard Somé, « notre objectif est de lutter contre toutes formes de sévices faites aux enfants. Mais nous rencontrons des difficultés avec certains parents d’enfants qui sont réticents à nos actions de sensibilisation. La démission de ces derniers est une réalité. Ce qui n’est pas de nature à faciliter les actions du réseau ».

Boubacar TARNAGUIDA

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